Caroline Pascal, directrice générale de l’enseignement scolaire (DGESCO)
Quel a été ton parcours après l’ENS ?
Après ma sortie de l’ENS en 1991, alors que j’avais profité de mes deux dernières années à l’École pour être chargée de cours à l’université de la Sorbonne, j’ai enseigné jusqu’en 2009 dans des contextes très différents et sous tous les statuts, d’abord à l’université à Bordeaux comme allocataire monitrice normalienne (AMN), puis à Lille comme assistante temporaire d’enseignement et de recherche (ATER), à Paris comme professeur agrégé (PRAG) et enfin comme maître de conférences (MCF) après avoir soutenu une thèse sur les traductions françaises du premier roman picaresque espagnol, le Lazarillo de Tormes. J’ai également enseigné en collège et lycée et en classes préparatoires littéraires, dans la khâgne du lycée La Bruyère à Versailles où j’avais en charge l’option espagnol pour l’entrée à l’ENS de Lyon.
Après ces vingt années passées à enseigner avec un réel plaisir à des publics très divers, d’âges très différents et sur un éventail d’objets d’enseignement très complet, de la littérature à la traductologie, des bases de la langue à la version classique et moderne, je me suis portée candidate à l’inspection générale en 2009. J’avais eu l’occasion de travailler avec les inspecteurs généraux en charge de l’enseignement de l’espagnol en partageant la responsabilité de la validation des sujets de baccalauréat. Être en charge de la stratégie de l’apprentissage des langues, concevoir programmes et ressources, accompagner les professeurs et les inspecteurs territoriaux pour faire progresser les élèves m’ont paru alors être de nouveaux défis pour la seconde partie de ma carrière.
En 2013, le groupe des inspecteurs généraux en charge des langues vivantes m’a élue pour piloter le groupe et j’ai exercé cette fonction pendant cinq ans. En 2018, j’ai été nommée doyenne de l’inspection générale de l’éducation nationale par le ministre qui m’a chargée d’une mission particulière consistant à accomplir la fusion entre les inspections générales couvrant les champs de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de la recherche, de la jeunesse, des sports et des bibliothèques. L’objectif était de créer un seul corps d’inspecteurs généraux capable de suivre et d’évaluer les politiques publiques portant sur la jeunesse, couvrant sans interruption le parcours des élèves et des étudiants depuis la maternelle jusqu’au doctorat, sur le temps scolaire, périscolaire et extrascolaire, afin d’assurer la cohérence des stratégies mises en œuvre par l’État. En 2019, quand le nouveau corps a été créé, les ministres en charge de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche, de la jeunesse et des sports m’ont fait l’honneur de me nommer comme cheffe de l’inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche. Ce corps a été mis en extinction et transformé en service dans le cadre de la réforme générale des corps d’inspection en 2023, réforme que j’ai eu à conduire pour l’IGÉSR.
En août 2024, j’ai été nommé directrice générale de l’enseignement scolaire par décret du Président de la République.
Quel est le rôle d’un ou une DGESCO (ses priorités…) ?
Le rôle de la direction générale de l’enseignement scolaire, c’est de faire réussir douze millions d’élèves chaque année, dans un cadre républicain et dans un souci d’égalité des chances, en offrant à tous les moyens de leur ambition et en leur apprenant les règles de notre vie en commun. C’est d’assurer la promesse républicaine de l’école.
La DGESCO définit ainsi ce qu’ils doivent apprendre tout au long de leur scolarité et en assure le déroulement dans les meilleures conditions, en définissant et publiant les programmes scolaires, en organisant les évaluations, ainsi que les examens, brevet, bac, CAP, en mettant en place les aménagements nécessaires pour les élèves à besoins particuliers. Pour une meilleure réussite des élèves, elle propose et organise la formation des professeurs, leur fournit des ressources pour nourrir leur enseignement.
La DGESCO supervise également la vie des écoles et des établissements. Elle met ainsi en place tout ce qui doit permettre un climat scolaire apaisé, une vie sereine dans l’école, au collège ou au lycée : les mesures pour lutter contre le harcèlement, assurer la protection des élèves et des personnels. Elle apporte enfin à tous ceux qui le souhaitent des occasions de construire la cohésion dans l’établissement en proposant des actions éducatives pour favoriser l’engagement collectif des élèves. Elle apporte son soutien les établissements qui se lancent dans des projets nouveaux en favorisant le rapprochement des acteurs de l’école avec les élus territoriaux, les familles, les associations, les partenaires, le tissu économique. L’école est en effet toujours inscrite dans son territoire.
Tout cela se fait en répartissant équitablement les moyens qui sont attribués aux différents programmes budgétaires dont la DGESCO est responsable : répartition des enseignants sur tout le territoire par rapport au nombre d’élèves, aux conditions d’enseignement sociales, géographiques, et aux orientations politiques et répartition des crédits pédagogiques dévolus par l’État pour accompagner la vie de l’élève.
Pour atteindre cet objectif, la DGESCO travaille sous l’autorité du ou de la ministre, en lien direct avec les autres directions et avec les académies à travers le dialogue de gestion annuel organisé avec les recteurs et leurs équipes. Ces rencontres permettent à la fois de voir comment les politiques éducatives décidées par la ministre [Anne Genetet] se déploient et de répartir les moyens par rapport aux réalités de chaque territoire. Elles permettent d’échanger sur les réussites, les difficultés, les leviers et les impasses.
En quoi ta formation à l’ENS a-t-elle été utile dans ton parcours et pour ces fonctions ?
La formation des khâgnes apprend la rigueur, l’exigence et la régularité dans le travail qui n’ont cessé de m’être utiles ensuite. Le cursus depuis l’hypokhâgne jusqu’à l’agrégation apporte une méthode et une culture de généraliste, qui rend capable d’appréhender toutes sortes de sujets de manière synthétique, de construire un raisonnement. Le travail de recherche et la rédaction de la thèse qui réclament au contraire un travail d’analyse approfondi, de tri et de hiérarchisation des informations et pour mon parcours de littéraire, une attention aiguë aux mots, à la rédaction, ont complété ma formation. En combinant les deux démarches, je m’appuie tous les jours sur cette formation acquise dans mes premières années d’étudiante avec l’objectif d’apporter un conseil solide et étayé aux décideurs politiques, de construire un cadre rigoureux aux politiques éducatives mais aussi de conduire une équipe avec l’écoute et l’attention que j’ai trouvées chez mes maîtres et qui permettent à chaque membre de la DGESCO, du chef de service au chargé d’étude, de m’apporter à son tour l’expertise la plus complète et le conseil le plus approprié et le plus direct en toute confiance.
Propos recueillis par François Louveaux (1974 L SC)
auprès de Caroline Pascal (1987 L FC), 31 octobre 2024
Portrait ci-dessus : ©Philippe Devernay
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