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Genèse de l’offre sportive : de l’ENS LSH à l’ENS de Lyon


A l’occasion des vingt ans de l’arrivée à Lyon de l’ENS LSH, le Bulletin de l’Association des élèves et anciens élèves m’offre l’opportunité de me replonger dans mes souvenirs et de témoigner de la construction de l’offre sportive de notre école. Cette lente maturation est bien évidemment le fruit d’un travail collectif, je pense notamment aux enseignants d’EPS titulaires qui se sont succédé (Catherine Bazin, Joëlle Metzler et Matthieu Qui du côté ENS LSH, Jean-Claude Mahnes côté ENS Lyon) mais également aux enseignants vacataires, trop nombreux pour être tous cités, mais qui font partie intégrante de cette histoire.

Lors de mon entretien de recrutement réalisé par Sylvain Auroux (67 L SC), Francine Mazière (60 L FT) et Catherine Bazin, je me suis rendu sur le site de l’ENS à Fontenay-aux-Roses. L’école se préparait au grand déménagement et l’objectif affiché lors de cet échange était de développer l’offre sportive qui était plutôt minimaliste à Fontenay du fait du manque d’installations sportives. Sylvain Auroux souhaitait trouver un enseignant d’EPS en mesure d’enseigner le tennis sur le terrain flambant neuf du site Descartes, mais également d’encadrer des stages de ski du fait de la proximité des Alpes et de proposer des activités collectives dans le nouveau gymnase. A l’issue de l’entretien, une dernière question pour savoir si un départ de Paris vers Lyon serait un problème me concernant… Bien au contraire, c’était une occasion inespérée de retrouver au plus vite ma région et de quitter le collège Pasteur de Gennevilliers dans lequel j’avais débuté ma carrière d’enseignant. 

L’arrivée sur le site de Lyon ne fut pas un long fleuve tranquille. Au commencement, ce fut le béton et les plâtres. Lors de ma toute première rentrée en septembre 2000, en compagnie de Catherine Bazin, le gymnase n’était pas achevé. Il faudra attendre encore quatre longs mois pour qu’il soit vaguement utilisable (si on fait abstraction des murs en plâtre s’écroulant sous l’impact des ballons et de la sonorisation catastrophique nous plongeant constamment dans un environnement assourdissant). C’est donc dans ce contexte peu favorable qu’il a fallu inciter cette première génération d’étudiants à pratiquer une activité sportive facultative. Mission ardue que de convaincre des étudiants encore fraichement « traumatisés » par la pratique de l’endurance en éducation physique et sportive des bienfaits du footing dans le parc de Gerland.

En revanche, une fois les travaux achevés, nous disposions d’outils de travail exceptionnels entièrement réservés à nos étudiants et au personnel.

Cette première année, l’Association sportive de l’ENS LSH n’a comptabilisé que cent quatre-vingt-douze adhérents mais nous avons posé les premières fondations de ce qui deviendra la culture sportive de l’école. Seules, quatorze activités sportives sont inscrites dans l’emploi du temps de l’année 2000-2001 et une programmation de sorties de ski (encore en francs). Cependant, on retrouve déjà ce qui deviendra notre ADN, à savoir des activités artistiques, des activités de bien-être (yoga, relaxation, stretching) et des activités de plein air, en plus des activités que l’on retrouve dans tous les établissements. A noter que c’est justement cette offre « plus classique » (sports collectifs, sports de raquette, escalade, musculation) que nous retrouvions à l’ENS Lyon arrivée quatorze ans avant nous (en 1986) sur ce que nous nommons désormais le site Monod et qui regroupe les formations scientifiques. Il faudra attendre près de dix ans et la fusion en 2010 pour « briser » cette distance et parcourir les huit cents mètres qui séparent les deux sites. Les étudiants avaient quant à eux initié ce rapprochement quelques années avant (notamment dans le cadre extra-scolaire).

Les installations sportives de l’ENS LSH qui deviendra l’ENS de Lyon (Site Descartes). De haut en bas : Le gymnase, le court de tennis et la salle de danse, 2012.

Lorsqu’on regarde l’offre actuelle qui comporte trente-cinq activités sportives proposées à plus de mille quatre cents adhérents, on se rend compte du chemin parcouru depuis cette toute première rentrée. On retrouve dans la programmation actuelle les piliers déjà présents en 2000 (activités de bien-être, artistiques et plein air), enrichis par des nombreuses pratiques physiques et sportives, ce qui nous a permis d’avoir autant d’adhérentes que d’adhérents et près de deux fois plus de membres à l’Association sportive de l’ENS de Lyon que dans celles d’Ulm ou Cachan en 2014. 

La mission essentielle que nous nous sommes fixée étant de contribuer à lutter contre la sédentarité de nos étudiants et du personnel, nous avons dû constamment nous adapter à leurs profils et attentes. Lorsque vos enseignements sont facultatifs, comme c’est le cas à l’ENS de Lyon, l’effectif présent semaine après semaine est le seul juge. Nos étudiants ne sont pas du genre à protester quand le contenu du cours ne leur convient pas, ils disparaissent et le cours se vide inexorablement. La pratique facultative a cet avantage de fournir un feedback cru et sans filtre qui nous impose de prendre en compte les motivations de notre public, aussi éloignées soient-elles de notre culture personnelle. Pour nous autres, enseignants d’EPS, habitués au sport de bon niveau, ne pas compter le score n’a aucun sens mais pour certains étudiants qui sortent de CPGE, il n’en va pas de même. En effet, s’échapper de cette compétition permanente imposée par les concours était bien plus salutaire à leurs yeux : « le plaisir et le défoulement passent bien avant la victoire ». Notre volonté a donc toujours été de tenter de proposer des activités pour tous les niveaux et pour tous les goûts, le tout, en dehors des horaires des cours académiques. Avec des enseignements proposés entre 18 et 22 heures, nos emplois du temps sont donc foncièrement différents de ceux de nos collègues : une vie de couche-tard qui vous éloigne des dîners familiaux.

Parmi les nombreux souvenirs forts de ces années, je ne peux m’empêcher de penser aux stages, ces moments de vie en collectivité en dehors des murs. Traverser la Corse en dormant dans des bergeries sans douche, sans électricité et sans réseau téléphonique, randonner au bord du volcan de la Fournaise ou aux lacs des Chéserys en face du Mont-Blanc, descendre la vallée Blanche à ski, apprendre à skier à des générations d’étudiants qui découvrent cette activité à vingt ans, bivouaquer au bord de l’Ardèche… quel dépaysement et que de souvenirs pour eux.

Randonnée en Corse: une bergerie

Randonnée aux lacs des Chéserys

Descente de l’Ardèche en canoë

InterENS 2017. ENS, Paris, 17-19 novembre 2017

Parmi les évènements marquants, on peut citer les InterENS, qui regroupent chaque année depuis 1988 les quatre ENS françaises — Paris-Saclay (anciennement Cachan), Lyon, Ker-Lann (Rennes) et Paris (Ulm) — et la Scuola Normale Superiore de Pise. Il faut avouer que l’ENS LSH n’a intégré ce tournoi sportif que par le biais de l’ENS Lyon voisine et à partir de 2010. Le lieu de cette manifestation tourne entre les quatre ENS françaises, sa durée est celle d’un week-end.

Et que dire de cette génération de volleyeurs qui est parvenue pour la première fois de l’histoire de l’école à intégrer les phases finales des championnats de France des écoles en 2013.

L’équipe de volley 2013

Nombreuses sont les rencontres, les anecdotes, les victoires, les défaites, les aventures mais elles ont toutes en commun de dépasser la seule dimension motrice.

Reste un regret, l’investissement sportif de nos étudiants a toutes les peines du monde à être reconnu dans le cadre de leurs formations et diplômes : le dualisme cher à Descartes a la peau dure à l’ENS de Lyon. Et pourtant, je ne compte plus le nombre de fois où j’ai entendu la célèbre formule mens sana in corpore sano, il ne reste plus qu’à passer des paroles aux actes et à franchir le pas…

Richard NEMETH, responsable du centre des sports et enseignant agrégé d’EPS
à l’ENS de Lyon depuis septembre 2000, 26 septembre 2021,

Toutes les illustrations proviennent des archives de R. Nemeth. Nous le remercions. En savoir plus : http://www.ens-lyon.fr/campus/sport

Depuis le 25 novembre 2021, est à l’étude la reconnaissance, dans le diplôme de l’ENS, de l’investissement des étudiantes et des étudiants participant aux cours de sport encadrés. 


Pour citer ce texte : Richard NEMETH, Genèse de l’offre sportive : de l’ENS LSH à l’ENS de Lyon, Bulletin de l’association des élèves et anciens élèves des ENS de Lyon, Fontenay, Saint-Cloud, n°2, 2021, p. 58-61.