Disparition de Jean-Claude Carrière (17 sept. 1931 - 8 fév. 2021)
Une belle voix s’est tue. Celle d'un écrivain, scénariste, parolier, metteur en scène, acteur, qui fut aussi cofondateur et premier président de la FEMIS.
Né à Colombières-sur-Orb (Hérault) dans une famille de viticulteurs, Jean-Claude Carrière (53 L SC) était entré en histoire à l’École normale supérieure de Saint-Cloud. Il abandonna rapidement sa vocation d’historien pour l’écriture et le dessin et publia dès 1957 un roman, Lézard, et, l'année suivante, la novélisation de Mon oncle de Jacques Tati. Chez ce dernier, il avait rencontré Pierre Étaix et cosigna plusieurs de ses films et courts-métrages. Sa collaboration avec Luis Buñuel dura dix-neuf ans, jusqu'à la mort du réalisateur (six films dont Belle de jour, La Voie lactée et Le charme discret de la bourgeoisie). Il ne s’est pas consacré uniquement au cinéma. Il a été dramaturge et adaptateur pour Jean-Louis Barrault (adaptation de Harold et Maude) et pour Peter Brook au Théâtre des Bouffes du Nord : Timon d'Athènes (1974), Mesure pour Mesure, La Cerisaie, La Conférence des Oiseaux, La Tragédie de Carmen. Il a également écrit la version scénique du Mahabharata, d’une durée de neuf heures. Il a travaillé aussi avec Jacques Deray, Patrice Chéreau, Jean-Luc Godard, Milos Forman, Volker Schlöndorff (Le Tambour), Nagisa Oshima (Max mon amour) et Andrzej Wajda (Danton et Les Possédés). Son dernier scénario date de 2020 : Le sel des larmes de Philippe Garrel.
Il a publié de nombreux ouvrages : essais, pièces de théâtre, des anthologies dont Humour 1900 et, en collaboration avec Guy Bechtel, son ami du lycée Lakanal, Le Dictionnaire de la bêtise et Le Livre des bizarres (nouvelle édition les réunissant : Bouquins, 2014). Mais aussi des essais sur le bouddhisme, sur les livres (N’espérez pas vous débarrasser des livres avec Umberto Eco) et des ouvrages témoignant de son goût pour l’astrophysique : Conversations sur l'invisible (1988, rééd. augm. en 1996, 2002) avec les astrophysiciens Jean Audouze et Michel Cassé suivi de Du nouveau dans l'invisible (mêmes auteurs, Odile Jacob) ; mais aussi avec Jean Audouze en 1996 : Regards sur le visible puis Merveilleux cosmos ! avec Jean Audouze et Erik Orsenna (CNRS éd.).
Il a reçu deux British Academy Films Awards (1974 et 1989), un César du meilleur scénario original pour Le Retour de Martin Guerre, le Molière de l’adaptateur pour La Tempête et enfin un Oscar d’Honneur en 2015.
Par l'entremise de l'astrophysicienne Danielle Alloin (65 S FT), il nous avait fait l’honneur et l’amitié de venir évoquer l’École et la khâgne (elles étaient indissociables selon lui) ainsi que son œuvre à l’assemblée générale de l’association des élèves et anciens élèves le 28 mars 2009. Ses propos ont été recueillis et mis en ligne. Il avait alors eu cette réponse à une question sur l’identité des normaliens : « il n’y a pas un modèle de normalien mais la chance, les désirs et les capacités jouent un grand rôle ainsi que l’apprentissage des techniques du savoir. Il faut avoir le courage de dire à la sortie de l’École qu’il y a d’autres modes d’expression que ceux qu’on a appris. » https://alumni.ens-lyon.fr/page/rencontre-avec-jean-claude-carriere
A l’occasion de sa venue, deux élèves, Gabriel Bortzmeyer (études cinématographiques, 2008 L SH) et Sacha Todorov (études théâtrales, 2008 L SH) avaient proposé un montage de textes qui était un parcours dans l’œuvre de Jean-Claude Carrière à travers L'Aide-mémoire (1968),
Photo : Studio Harcourt (sous licence CC BY 3.0)
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